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et Tréboul manient toujours les grands avirons ; puis, au bout de quelques instants, des centaines de bulles d’air crèvent à la surface, un immense éclair d’argent luit entre deux eaux, et le filet coule à pic : le poisson est pris.

Doucement il est retiré, et tandis qu’un autre est immédiatement placé à l’arrière pour le remplacer, on secoue le premier, brasse par brasse, sans toucher la sardine prise par les ouïes dans les mailles ; ils savent bien que le moindre contact de la main suffit pour l’abimer.

Peu à peu tout le fond de la cale s’emplit et une satisfaction douce flambe dans les faces de cuivre rouge de Kerbonn, de Lagadec, de Tréboul, de Guivarcʼh et de Pierrik ; on aura de fortes parts au retour.

Le jour baisse ; les filets sont tous ramassés, l’embarcation est pleine. On remet les mâts en place, on hisse les voiles, et la Marie-Anne, s’inclinant sous la brise qui augmente, se dirige vers le Toulinguet, dont le profil se dessine au nord.

Elle est encore à la hauteur des Tas-de-Pois, lorsqu’une barque la rejoint et marche de conserve avec elle.

— La sardine a donné, hein ? lance une voix bienveillante.

Le patron s’arrache à l’engourdissement qui l’avait couché à l’arrière, la barre du gouvernail