Page:Gustave Toudouze - Péri en mer, 1905.pdf/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Hervé, malgré son endurcissement, son mépris de la mort, sentit un froid de glace couler par tous ses membres, et un juron gronda au fond de sa gorge :

— Le diable soit de…

Il n’osa achever, mordu par la superstition originelle, son sang de Breton de nouveau remué secrètement, comme le premier soir dans les dunes, en dépit du cynisme dont l’avaient cuirassé les années mystérieuses de son existence à l’étranger.

Les sinistres mots lui entraient syllabe à syllabe en plein crâne, roulant leurs rocailles armoricaines :

Eul linser wenn ha pemp planken.

. . . . . . . . . . . .

comme si le cercueil se fût dressé là, prêt à le saisir entre ses cinq planches.

N’osant rien dire, il était parti, se sauvant presque, poursuivi par le bourdonnement de deuil.

Du reste, la pauvre folle lui faisait pitié et le tenait sous une sorte de suggestion, dont il n’aurait pu au juste s’expliquer l’origine ; il eût tout fait pour lui épargner une souffrance, un chagrin. C’était là comme un lien du sang, plus fort que sa volonté, un souvenir lointain qui renaissait, le reprenait, redevenait en lui puissant et doux comme aux années d’enfance, lorsqu’il promenait