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CHAPITRE III.

effet, si ce n’est par pitié, du moins par peur, épargne les corps des vivants, tandis que, pour les scélérats dont nous parlons, vivants et morts sont une proie égale. Ce sont ces bandes d’hommes et de femmes recrutées de la pire des canailles, qui fourmillent toujours autour du train et des convois des grandes armées, et auxquelles se joignent les pillards et les vagabonds de la contrée. Après la bataille, ces bêtes féroces à face humaine se répandent sur le lieu du combat, qui est malheureusement trop abandonné à leur épouvantable industrie, volant et égorgeant même, quand cela est nécessaire, les malheureux blessés, dépouillant les cadavres sanglants. Les havre-sacs et toutes les poches sont vidés, les vêtements enlevés des corps encore chauds, les chaussures arrachées, et, peu après que la horde de brigands des deux sexes a commencé son œuvre, on voit déjà par centaines les cadavres nus dénoncer leur activité ; les cris de douleur de leurs victimes ne les émeuvent point ; le doigt est coupé pour arracher la bague, le bras ou la jambe brisés sont martyrisés pour enlever un manteau ou une botte, les malheureux tremblants de la fièvre sont laissés avec leurs plaies béantes exposés au froid de la nuit ; le couteau fait prompte-