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campagne, choisit au hasard un sentier, et se trouva presque immédiatement à la porte du château.

La nuit, il ne dormit pas. Sous le vacillement de la lampe suspendue, il revoyait toujours le grand cerf noir. Sa prédiction l’obsédait ; il se débattait contre elle :

— Non ! non ! non ! je ne peux pas les tuer !

Puis il songeait :

— Si je le voulais, pourtant ?…

Et il avait peur que le Diable ne lui en inspirât l’envie.

Durant trois mois, sa mère en angoisse pria au chevet de son lit, et son père, en gémissant, marchait continuellement dans les couloirs. Il manda les maîtres mires les plus fameux, lesquels ordonnèrent des quantités de drogues. Le mal de Julien, disaient-ils, avait pour cause un vent funeste, ou un désir d’amour. Mais le jeune homme, à toutes les questions, secouait la tête.

Les forces lui revinrent ; et on le promenait dans la cour, le vieux moine et le bon seigneur le soutenant chacun par un bras. Quand il fut rétabli complètement, il s’obstina à ne point chasser.

Son père, le voulant réjouir, lui fit cadeau d’une grande épée sarrasine.

Elle était au haut d’un pilier, dans une pano-