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damis
en souriant.

Oh ! il n’a besoin de rien ! C’est un sage ! Quant à moi, bon ermite, je vous demanderai un peu d’eau, car j’ai grand’soif.

Antoine va chercher une cruche dans sa cellule, et, la levant lui-même, offre à boire à Damis.
Peu à peu, la fumée disparaît.
Damis, après avoir bu :

Pouah ! qu’elle est mauvaise, vous devriez bien l’enfermer sous de la verdure !

antoine.

C’est qu’il n’y a pas un brin d’herbe aux environs, seigneur !

damis.

Ah ! n’auriez-vous rien, dites-moi, à mettre sous la dent ? car j’ai grand’faim !

Antoine va dans sa cabane et en rapporte un morceau de pain noir, desséché.
Damis mord à même :

Qu’il est dur !

antoine.

Je n’en ai pas d’autre, seigneur !

damis.

Ah !

Il casse le pain, en retire la mie et jette les croûtes. Le cochon se précipite dessus : Antoine fait un geste de colère pour le battre.

Laissez donc ! ne faut-il pas que chacun vive !

Silence.
antoine
reprend.

Et vous venez ?

damis.

Oh ! de loin… de très loin !