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extérieur et le moins romantique pour ainsi dire, ce romantisme à ogives et à cottes de mailles, qui est à celui de Gœthe et de Byron ce qu’est le classique de l’empire au classique du xviie siècle, dont Walter Scott peut-être a été le père et le bibliophile Jacob à coup sûr l’ensevelisseur. Aussi, quand il sortait de son admiration égale pour les modèles respectés, c’était alors pour vanter quelque production inconnue d’un génie incompris, qu’il regardait toujours comme le premier du siècle, et il employait pour le vanter des formules d’une admiration hyperbolique, tout à fait indigne des honnêtes gens ; puis, dès que la mode s’en était passée ou que sa manie avait cessé, il en revenait avec d’autant plus d’acharnement et d’exclusion à ses maîtres favoris, et il n’en a pas d’autres.

Jules, au contraire, avait une irrésistible attraction pour les époques plantureuses telles que le bas-empire et le xvie siècle, où la végétation complète de l’esprit humain s’est montrée dans toute sa richesse et son abondance, où tous les éléments ont été mêlés, toutes les couleurs employées ; de même qu’il était épris avant tout de ces rares génies dont la variété et l’ampleur sont le trait dominant et dont la vérité constitue l’originalité : Homère et Shakespeare étaient les dieux de son ciel poétique. Sentait-il, d’ailleurs, le besoin de se retremper dans une forme plus concrète et plus simple, où le détail a plus de charmes, plus de physionomie en lui-même ? il remontait à la source même de la grâce et à la beauté incarnée, c’est-à-dire à la Grèce, à Sophocle ; il relisait aussi Corneille pour la simplicité et Voltaire pour la netteté.

Ne recherchant dans l’art que des sensations ou de simples amusements d’esprit, Henry ne s’entendait pas avec Jules, qui y puisait des émotions d’intelligence et y cherchait le rayonnement de cette Beauté rêvée qu’il sentait en lui-même.

Partant de deux principes opposés, de deux points