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smarh.

Le vide était donc plus vide encore ! cet infini, dans lequel nous roulons, était plus large encore ! Cela était plus grand et plus beau, n’est-ce pas ?

satan.

Bien plus beau, car nous dormions, nous tous, dans la mort d’où nous devions naître.

smarh.

Et ses bornes étaient encore plus loin ?

satan.

Je t’ai déjà dit qu’il n’y avait point de bornes à cela.

smarh.

Mais le chaos qui existait, qui l’avait fait ? il avait fallu un Dieu pour le faire.

satan.

Il s’était fait de lui-même.

smarh.

Quand donc ? Oh ! l’abîme ! oh ! l’abîme ! J’aurais bien voulu vivre alors ! comme j’aurais alors nagé là dedans, comme mon âme se serait déployée dans cette immense nuit éternelle !

satan.

Hélas ! depuis, la machine est faite, elle roule, elle broie, elle tourne toujours.

smarh.

Ne se lassera-t-elle jamais ?

satan.

Je l’espère, car l’éternité…