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désireux qu’ils étaient de courir dans la plaine. Les chiens, que chaque cavalier tenait en laisse, aboyaient autour d’eux en leur mordant les jambes, et déjà plus d’un juron, plus d’un coup de cravache avaient calmé l’ardeur de quelques-uns.

Le duc et sa famille étaient prêts et n’attendaient plus que quelques dames et le bon docteur Roderigo, qui arriva monté sur une superbe mule noire.

La grande porte s’ouvrit et l’on se mit en route, les hommes montés sur des chevaux, la carabine sur l’épaule et le couteau de chasse au côté gauche ; quant aux dames, elles suivaient par derrière, montées sur des haquenées et le faucon au poing.

Cosme et le cardinal ouvraient la marche ; en passant sous la porte, la jument de ce dernier eut peur de la toque rouge d’une des sentinelles et fit un bond qui faillit renverser son cavalier.

— Mauvais présage, grommela le duc.

— Bah ! est-ce que vous croyez à ces niaiseries-là ? Vous plaisantez, sans doute ? dit Roderigo.

Cosme se tut et enfonça l’éperon dans le flanc de son cheval qui partit au trot ; on le suivit.

Le bruit des chevaux sur le pavé, celui des épées qui battaient sur la selle firent mettre tous les habitants aux fenêtres pour voir passer le cortège de monseigneur le duc Cosme II de Médicis, qui allait à la chasse avec son fils le cardinal.

Arrivée sur une grande place, la compagnie se divisa en trois bandes différentes, le premier piqueur donna du cor et les cavaliers partirent au galop dans les rues de Florence.

Cosme était avec Roderigo, Garcia avec François, et Bellamonte, avec les dames et les archers, devait forcer le gibier.

Le temps était sombre et disposé à l’orage, l’air était étouffant et les chevaux étaient déjà blancs d’écume.