Page:Guizot - Mélanges politiques et historiques, 1869.djvu/220

Cette page n’a pas encore été corrigée

couver, de le faire éclore ? Le pouvoir s’arroge-t-il donc la mission de Satan ? Et la pauvre nature humaine n’est-elle sous sa main que pour avoir à se défendre de ses tentations ?

Mais de l’espionnage à la provocation, l’intervalle est court et le chemin glissant, à ce qu’on assure. Cela est vrai ; aussi les espions ont-ils à répondre de leur conduite à des fonctionnaires qui répondent de leur emploi. Quand l’autorité descend dans la boue, la responsabilité y descend avec elle. L’autorité ne peut être nulle part que la responsabilité ne la suive, toujours attachée à ses pas ; et plus l’usage de l’autorité a de périls, plus la responsabilité est impérieuse. Il serait trop étrange que la honteuse nature de certains services, de certains agens, affranchît le pouvoir de sa condition permanente, et frustrât la société de sa seule garantie.

Lors donc que les espions deviennent provocateurs, lorsqu’ils prennent l’initiative du crime, tendent des pièges devant les faibles, et cherchent une pâture à leur infâme habileté, le pouvoir qui s’en sert en répond, et c’est à lui qu’on en doit demander compte.

Que sera-ce si, après leur avoir laissé enfanter un crime qui peut-être n’eût jamais vu le jour sans