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de quelques hommes cet odieux résultat. Dès que la politique pénètre dans l’enceinte des tribunaux, peu importent la main et l’intention qui lui en ont fait franchir le seuil ; il faut que la justice s’enfuie. Entre la politique et la justice toute intelligence est corruptrice, tout contact est pestilentiel.

Que la société regarde donc bien aux moindres symptômes de ce rapprochement ; qu’elle s’en inquiète dès le premier jour, et ne se laisse imposer par aucune excuse. Ni les circonstances, ni les hommes, rien ne doit rassurer contre le fait même. Si les circonstances sont graves, elles s’aggraveront ; si les hommes sont honnêtes, ils se pervertiront. Les pouvoirs n’ont point de privilège sur la nature humaine ; pour eux comme pour les individus, le mal enfante le mal, l’abîme invoque l’abîme. Pour eux comme pour nous, un pas fait hors de la bonne voie révèle et les fautes antérieures, et les fautes futures. Et la condition de la politique et de la justice est ici la même ; à l’une et à l’autre leur rapprochement est également fatal ; en le recherchant la politique s’accuse ; en s’y prêtant la justice se perd : et il est du devoir de tout bon citoyen d’observer avec anxiété tout ce qui l’annonce, dans l’intérêt