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quels l’histoire de la civilisation peut conduire. Il me suffit d’avoir indiqué sa place et sa grandeur.

D’après tout ce que je viens de dire, Messieurs, il est évident que l’histoire de la civilisation pourrait être traitée de deux manières, puisée à deux sources, considérée sous deux aspects différents. L’historien pourrait se placer au sein de l’âme humaine, pendant un temps donné, une série de siècles, ou chez un peuple déterminé ; il pourrait étudier, décrire, raconter tous les événements, toutes les transformations, toutes les révolutions qui se seraient accomplies dans l’intérieur de l’homme ; et quand il serait arrivé au bout, il aurait une histoire de la civilisation chez le peuple et dans le temps qu’il aurait choisi. Il peut procéder autrement : au lieu d’entrer dans l’intérieur de l’homme, il peut se placer au milieu de la scène du monde ; au lieu de décrire les vicissitudes des idées, des sentiments de l’être individuel, il peut décrire les faits extérieurs, les événements, les changements de l’état social. Ces deux portions, ces deux histoires de la civilisation sont étroitement liées l’une à l’autre ; elles sont le reflet, l’image l’une de l’autre. Cependant elles peuvent être séparées ; peut-être même doivent-elles l’être, au moins en commençant, pour que l’une et l’autre soient traitées avec détail et clarté. Pour mon compte, je ne me propose pas d’étudier avec vous l’histoire de la civilisation dans l’intérieur de l’âme humaine ; l’histoire des événements extérieurs du monde visible et social, c’est de celle-là que je veux m’occuper. J’avais besoin de vous exposer le fait de la civilisation tel que je le conçois dans sa complexité et son étendue, de poser devant vous toutes les hau-