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là que des hommes investis des mêmes droits que lui, dans la même situation que lui, agissant comme lui au nom de leur volonté personnelle. Rien ne le portait, ne le forçait à reconnaître, dans la portion la plus élevée du gouvernement, dans les institutions que nous appelons publiques, ce caractère de supériorité, de généralité, inhérent à l’idée que nous nous formons des pouvoirs politiques. Et s’il était mécontent de la décision, il refusait d’y concourir, ou en appelait à la force pour y résister.

La force, telle était, sous le régime féodal, la garantie véritable et habituelle du droit, si on peut appeler la force une garantie. Tous les droits recouraient sans cesse à la force pour se faire reconnaître ou respecter. Nulle institution n’y réussissait. On le sentait si bien, qu’on ne s’adressait guère aux institutions. Si les cours seigneuriales et les parlements de vassaux avaient été en état d’agir, on les rencontrerait bien plus actifs, bien plus fréquents que ne les montre l’histoire ; leur rareté prouve leur nullité.

Il ne faut pas s’en étonner ; il y en a une raison plus décisive et plus profonde que celles que je viens d’indiquer.

De tous les systèmes de gouvernement et de garantie politique, à coup sûr le plus difficile à établir, à faire prévaloir, c’est le système fédératif ; ce système, qui consiste à laisser dans chaque localité, dans chaque société particulière, toute la portion de gouvernement qui peut y rester, et à ne lui enlever que la portion indispensable au maintien de la société générale, pour la porter au centre de cette même