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Il restait, de plus, d’assez grands débris de la civilisation romaine. Le nom de l’Empire, le souvenir de cette grande et glorieuse société, agitait la mémoire des hommes, des sénateurs de villes surtout, des évêques, des prêtres, de tous ceux qui avaient leur origine dans le monde romain.

Parmi les Barbares eux-mêmes, ou leurs ancêtres barbares, beaucoup avaient été témoins de la grandeur de l’Empire ; ils avaient servi dans ses armées, ils l’avaient conquis. L’image, le nom de la civilisation romaine leur imposait, ils éprouvaient le besoin de l’imiter, de la reproduire, d’en conserver quelque chose. Nouvelle cause qui les devait pousser hors de l’état de barbarie que je viens de décrire.

Il y en avait une troisième, qui est présente à tous les esprits ; je veux dire l’Église chrétienne. L’Église était une société régulièrement constituée, ayant ses principes, ses règles, sa discipline, et qui éprouvait un ardent besoin d’étendre son influence, de conquérir ses conquérants. Parmi les chrétiens de cette époque, Messieurs, dans leur clergé chrétien, il y avait des hommes qui avaient pensé à tout, à toutes les questions morales, politiques, qui avaient sur toutes choses des opinions arrêtées, des sentiments énergiques, et un vif désir de les propager, de les faire régner. Jamais société n’a fait, pour agir autour d’elle et s’assimiler le monde extérieur, de tels efforts que l’Église chrétienne du cinquième au dixième siècle. Quand nous étudierons en particulier son histoire, nous verrons tout ce qu’elle a tenté. Elle a en quelque sorte attaqué la barbarie par tous les bouts, pour la civiliser en la dominant.