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des injustices qui vont, au besoin, jusqu’à la férocité, tombe en ruines. Les puissances maritimes commencent à comprendre qu’il est de leur intérêt de trafiquer avec tous les points du globe indistinctement ; elles protégeront l’indépendance des pays d’outre-mer pour que nulle d’entre elles ne puisse en écarter les autres, et nous les verrons, après s’être battues au 18me siècle pour asservir les colonies, se battre au 19me siècle pour affermir leur liberté.


Ce tableau général, mais trop resserré, de l’économie des nations, peut du moins laisser entrevoir l’intérêt que son étude présente quand on l’observe dans ses détails ; il peut aussi mettre en garde contre cette multitude d’idées fausses qui circulent parmi le vulgaire, relativement aux plus hauts intérêts des sociétés. Nous avons pu nous convaincre que, dans la vie sociale, l’impulsion ne réside point dans le gouvernement, mais dans les gouvernés ; c’est là qu’est la pensée, là qu’est l’action. Nous avons pu sentir la fausseté de cet emblème suranné qui représente l’état comme une famille, dont le chef de l’administration est le père. Dans la famille, c’est du père que viennent tous les moyens de subsistance ; c’est dans sa tête que naissent toutes les pensées utiles ; c’est lui qui procure les capitaux ; c’est lui qui travaille et dirige le travail de ses enfans. Il pourvoit à leur éducation et à leur établissement.

Dans l’état, c’est tout le contraire : les conceptions qui pourvoient à l’entretien du corps social, les capitaux, l’exécution, se trouvent chez les gouvernés. C’est là que l’on étudie les lois de la nature et que se forment les entreprises productives d’où naissent les revenus de la société. Plus accessibles à tous les genres de vérités, ce sont les gouvernés qui analysent avec le plus de succès la constitution physique et morale de l’homme, et l’économie sociale. Les nations sont réduites à s’estimer