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cette distribution sur le corps social. Ils se manifestent par le nombre et la condition des hommes.

La nature a pris de fortes précautions pour conserver les espèces vivantes. Le besoin qu’éprouvent tous les êtres organisés de se reproduire ; le soin dont ils protègent leurs rejetons, l’admirable contexture de leurs organes, montrent assez quel est son but ; mais de toutes les précautions- qu’elle a prises, celle sur laquelle elle semble avoir le plus compté est l’extrême profusion des germes, assurée par là que, quel que soit le nombre des individus qui périssent, il en restera toujours assez, non seulement pour perpétuer l’espèce, mais pour en couvrir le globe, pour peu qu’ils y trouvent de quoi subsister.

Nous subissons cette loi commune, et c’est un des faits maintenant le mieux avérés, qu’il n’y a pas de guerres, de massacres, ni d’épidémies, qui arrêtent les progrès de la population, toutes les fois que les moyens d’existence ne lui manquent pas. Mais pour une société civilisée, les moyens d’existence ne sont pas uniquement des subsistances ; chaque classe de la société, pour se conserver au même état, et, à plus forte raison, pour se multiplier, doit pouvoir consommer tout ce qui est indispensable au maintien de cette classe. Dans nos sociétés modernes, et parmi ce qu’on nomme les gens bien élevés, un homme qui serait condamné à se vêtir de haillons et à se nourrir des alimens dont un manouvrier se contente, serait un homme mort.

Si la population a une tendance à s’accroître progressivement, et si elle ne peut dépasser ses moyens d’existence, on peut établir comme une vérité de fait que la population d’un pays n’est jamais bornée que par ses produits.

Mais comment la production en général suffit-elle pour satisfaire aux besoins variés des différentes classes de la société ? Si c’est de blé qu’elle a besoin, comment une