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personnelles ; elle est la plus incontestable, car ces facultés ont été données à celui qui les possède, et à nul autre. La plus sacrée des propriétés après celle-là est celle des capitaux, parce qu’ils sont de la propre création de l’homme qui les possède, ou de celui qui les lui a transmis. Quiconque a retranché sur sa consommation de quoi former une portion de capital, pouvait ne pas faire cette épargne ; il pouvait dès lors anéantir toute autre prétention que la sienne sur la même valeur. C’est par une suite du même principe que les propriétaires des fonds productifs ont un droit incontestable sur le produit qui en émane, car ils étaient maîtres de faire que ce produit n’existât pas, en le consommant après l’avoir créé. La propriété dont la légitimité est la plus douteuse est la propriété foncière. Quel propriétaire est en état de prouver que sa terre a toujours passé à titre onéreux, ou par don volontaire, ou par succession, de main en main, du premier occupant jusqu’à lui ? Est-il un seul héritage qui ne remonte à une spoliation violente ou frauduleuse, récente ou ancienne, si ce n’est celui des descendans de Penn, légitimes acquéreurs du terrain des sauvages ?

Heureusement qu’il suffit à l’économie des sociétés que, malgré les différens degrés de légitimité, les propriétés de tout genre soient invariablement reconnues et maintenues, même la propriété foncière, la moins honorable de toutes. En effet, quel motif aurait-on pour ensemencer un champ, si l’on n’était pas assuré d’en recueillir les fruits ? On est d’autant plus excité à produire qu’on dispose plus librement de ses capitaux et de ses actions, et que la jouissance exclusive de leurs produits est plus assurée. De là l’invariable progrès des nations qui jouissent de la liberté et de la protection de leurs lois.


Après avoir étudié la marche des richesses dans leur distribution, l’économie politique observe les effets de