Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/71

Cette page a été validée par deux contributeurs.

viens, mes frères, je vous verrai dans cette vie : si je ne reviens pas, je vous verrai dans la vie à venir. Cependant je vous dis adieu. Priez et jeûnez pour nous, parce que le jeûne et l’aumône ont toujours fléchi la miséricorde du Seigneur. Souvenez-vous qu’il est écrit dans l’Évangile : Ne craignez point ceux qui tuent le corps, et qui ne peuvent tuer l’âme ; mais craignez plutôt celui qui peut perdre et l’âme et le corps dans l’enfer[1] viii. »

Saint Eugène ayant donc été amené vers le roi, discuta avec l’évêque des Ariens en faveur de la foi catholique ; et lorsqu’il l’eut puissamment confondu sur le mystère de la sainte Trinité, et que le Christ lui eut donné le pouvoir de faire beaucoup de miracles, ce même évêque, excité par l’envie, entra dans une plus grande fureur ; car saint Eugène était alors accompagné des hommes les plus sages et les plus saints de ce temps, des évêques Vindémiale et Longin, tous deux égaux en dignités aussi bien qu’en vertus, car saint Vindémiale passait dans ce temps pour avoir ressuscité un mort, et Longin avait guéri beaucoup de malades. Eugène ne détruisait pas seulement la cécité extérieure et des yeux, mais aussi l’aveuglement des esprits. Ce que ce méchant évêque des Ariens ayant vu, il fit venir vers lui un homme abusé de la même erreur où il vivait, et lui dit : « Je ne puis souffrir que ces évêques opèrent beaucoup de miracles au milieu du peuple, et que tout le monde me néglige pour les suivre. Reçois donc ces cinquante pièces d’or, pour consentir à ce que je t’ordonne. Asseois-toi sur la place publique qui est sur

  1. Évang. sel. S. Math. chap. 10, v. 28.