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sera un avertissement pour l’armée toute entière de voir mettre à mort un de ses chefs. Nous devons essayer ce qu’il convient de faire : si quelqu’un est en disposition d’obéir à la justice, qu’il soit obéi. Si quelqu’un la méprise, que la vengeance publique tombe sur sa tête ; car il vaut mieux qu’un petit nombre de coupables périsse, que si la colère de Dieu menaçait de mal toute la contrée. » Le roi ayant parlé ainsi, les ducs répondirent : « Il ne serait pas facile, ô roi très bon, d’exprimer toutes les vertus de ton âme magnanime, de dire ce qu’il y a en toi de crainte de Dieu, d’amour pour l’église, de respect pour les prêtres, de compassion pour les pauvres, de libéralité envers les nécessiteux. Tout ce que votre Gloire a exposé doit être regardé comme juste et véritable. Mais que pouvons-nous faire quand le peuples abandonne à toutes sortes de vices, quand tous les hommes se complaisent dans l’iniquité ? Nul ne craint le roi, nul ne respecte le duc ou le comte. Et si cette conduite déplait à quelqu’un, si pour prolonger votre vie, il s’efforce d’y apporter amendement, aussitôt le peuple se soulève, aussitôt se produisent des émeutes, et chacun se précipite plein de colère pour assaillir cet homme sage, et à grand’peine peut-il échapper, s’il ne se détermine à garder le silence. » Alors le roi dit : « Si quelqu’un suit la justice, qu’il vive ; si quelqu’un méprise nos ordres, qu’il périsse, afin que ce blâme ne nous poursuive pas plus long-temps. » Comme il parlait ainsi vint un messager qui dit : Reccared, fils de Leuvigild, est sorti d’Espagne, a pris le