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çant en âge, je m’appliquai à apprendre mes lettres, et je sus les écrire avant de pouvoir reconnaître ce qui était écrit. M’étant associé à l’abbé Arédius, et instruit par lui, j’allai dans la basilique du bienheureux Martin. Comme nous revenions ensemble, il avait dérobé un peu de la poussière bénite de ce bienheureux sépulcre ; il la mit dans une petite boîte, et la suspendit à mon cou. Lorsque nous fûmes arrivés à son monastère [Saint-Yriex] situé sur le territoire de Limoges, il prit la boîte pour la placer dans son oratoire. La poussière s’était tellement augmentée, que non seulement elle remplissait toute la boite, mais s’échappait par les bords et par toutes les issues. Ce miracle enflamma mon âme d’une plus vive lumière, et me décida à placer toutes les espérances de ma vie dans les mérites de ce Saint. De là je me rendis dans le territoire de Trèves, et j’y construisis de mes propres mains, sur cette montagne, la petite demeure que vous voyez. J’y trouvai un simulacre de Dianexx que les gens du lieu, encore infidèles, adoraient comme une divinité. J’y élevai une colonne, sur laquelle je me tenais avec de grandes souffrances, sans aucune espèce de chaussure ; et lorsque arrivait le temps de l’hiver, j’étais tellement brûlé des rigueurs de la gelée que très souvent elles ont fait tomber les ongles de mes pieds, et l’eau glacée pendait à ma barbe en forme de chandelles ; car cette contrée passe pour avoir souvent des hivers très froids. » Nous lui demandâmes ensuite avec instance de nous dire quelles étaient sa nourriture et sa boisson, et comment il avait renversé le simulacre de la montagne, il nous dit : « Ma nour-