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on repoussa les étrangers, et nous passâmes sans obstacle. Le lendemain, nous dîmes adieu au roi, et partîmes.

Dans notre route, nous arrivâmes au château d’Ivois[1] xvii. Là, nous trouvâmes le diacre Vulfilaïc xviii [Ulfilaïc] qui nous conduisit à son monastère, où nous fûmes reçus avec beaucoup de bienveillance. Ce monastère est à environ huit railles du château de Conflans, et situé sur la cime d’un mont. Vulfilaïc y a bâti une grande basilique qu’il a illustrée par les reliques de saint Martin et de plusieurs autres Saints xix. Pendant notre séjour dans ce lieu, nous commençâmes à le prier d’avoir la bonté de nous raconter quelque chose de son entrée en religion, et comment il était arrivé aux fonctions ecclésiastiques, car il était Lombard de naissance ; mais il ne se souciait pas de nous faire connaître ce que nous lui demandions, voulant de tout son cœur éviter la vaine gloire. Mais moi, l’en conjurant au nom des choses les plus redoutables, et lui promettant de ne rien divulguer de ce qu’il nous raconterait, je le priai de ne me rien cacher des choses sur lesquelles je l’interrogeais. Après s’y être refusé longtemps, vaincu tant par mes prières que par mes adjurations, il me dit : « J’étais encore un tout petit enfant, qu’ayant entendu prononcer le nom du bienheureux Martin, sans savoir si c’était un martyr ou un confesseur, ni ce qu’il avait fait de bien dans ce monde, ni quelle contrée avait mérité de posséder le tombeau qui renfermait ses membres bienheureux, je célébrais déjà des veilles en son honneur, et s’il m’arrivait quelque argent, je faisais l’aumône. En avan-

  1. Ou Ipsch, dans le duché de Luxembourg.