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sés de la fièvre. Son fils périt du même mal, et il l’ensevelit avec de grands gémissements dans un des faubourgs de Marseille, et sa maison fut frappée d’une telle plaie que, sorti de la ville, à peine pensait-on qu’il fût en état de regagner son pays. L’évêque Théodore fut retenu par le roi Gontran, mais le roi ne lui fit point de mal. C’est un homme d’une éminente sainteté, assidu à l’oraison, et de qui Magneric, évêque de Trèves [de 566 à 597], m’a raconté ce qui suit : « Lorsque les années précédentes on l’avait amené au roi Childebert, il était si rigoureusement gardé que, quand il arrivait à une ville quelconque, on ne lui permettait de voir ni l’évêque ni aucun des citoyens. Il vint à Trèves, et on annonça à l’évêque qu’on l’avait déjà fait entrer dans la barque qui devait l’emmener en secret. L’évêque affligé se leva, et le suivant en toute diligence, parvint à l’atteindre, tandis qu’il était encore sur le rivage. Il demanda aux gardes pourquoi ils en usaient avec cette cruauté de ne pas lui permettre de voir son frère. Cependant il le vit, l’embrassa, et après lui avoir donné quelques vêtements il le quitta. Il se rendit ensuite à la basilique de Saint-Maximin, et se prosterna devant le sépulcre, se rappelant ces paroles de l’apôtre Jacques : priez l’un pour l’autre, afin que vous soyez guéris[1]. Après avoir longtemps offert au Seigneur sa prière et ses larmes pour qu’il daignât venir au secours de son frère, il sortit de la basilique, et voilà qu’une femme agitée et tourmentée de l’esprit d’erreur, commença à appeler l’évêque, et à lui dire : Ô scélérat, devenu plus méchant par les années,

  1. Épît. de S. Jacques, chap. 5, v. 16.