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conserver les deux rois. Le roi ajouta : « Il est vrai que sa mère Brunehault [Brunichilde] menace de me tuer, mais je n’en ai aucune crainte. Le Seigneur qui m’a délivré des mains de mes ennemis, me délivrera de ses embûches. » Et il tint beaucoup de discours d’inimitié contre Théodore[1] vii [Théodorus] ; protestant que s’il venait au synode, il le renverrait en exil, disant : « Je sais qu’à cause de ces gens[2] viii, il a fait tuer mon frère Chilpéric ; mais que nous ne soyons pas tenus pour des hommes, si nous ne parvenons pas à venger sa mort dans le cours de cette année ! Je lui répondis : Et qui a fait périr Chilpéric si ce n’est sa méchanceté et tes prières ? Car il t’a tendu injustement des embûches qui l’ont conduit à la mort. Ce que je dis là m’est grandement apparu par une vision que j’ai eue dans mon sommeil. Je t’ai vu lui raser la tête, après quoi il a été sacré évêque ; ensuite je l’ai vu porté sur une chaise ix sans tenture et recouverte seulement d’une couleur noire ; devant lui brillaient des lampes et des cierges. » Comme je racontais cela, le roi me dit : « J’ai eu aussi une vision qui m’a annoncé sa mort. Trois évêques le conduisaient en ma présence chargé de chaînes. L’un d’eux était Tétrique [Tetricus], le second Agricola x, le troisième Nicet [Nicetius], évêque de Lyon. Deux d’entre eux disaient : Relâchez-le, nous vous en prions, et permettez qu’il s’en aille après avoir reçu urne punition. Mais l’évêque Tétrique répondait en colère : Il ne s’en ira point ainsi, et il sera consumé par le feu à cause de ses crimes. Et lorsqu’ils eu-

  1. L’évêque de Marseille dont il a été question dans le livre précédent.
  2. Probablement Gondovald et son parti.