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Gontran-Boson s’approcha du roi comme pour lui rappeler quelque chose ; et, comme il avait répandu que Gondovald venait d’être proclamé roi, Gontran, prévenant ses paroles, lui dit : « Ennemi de notre pays et de notre trône, qui précédemment es allé en Orient exprès pour placer sur notre trône un Ballomerx (le roi appelait ainsi Gondovald), homme toujours perfide et qui ne tiens rien de ce que tu promets ! » Boson lui répondit : « Toi, seigneur et roi, tu es assis sur le trône royal, et personne n’ose répondre à ce que tu dis ; je soutiens que je suis innocent de cette affaire. S’il y a quelqu’un, égal à moi, qui m’impute en secret ce crime, qu’il vienne publiquement et qu’il parle. Pour toi, très pieux roi, remets le tout au jugement de Dieu ; qu’il décide lorsqu’il nous aura vu combattre en champ clos. » À ces paroles, comme tout le monde gardait le silence, le roi dit : « Cette affaire doit exciter tous les guerriers à repousser de nos frontières un étranger, dont le père a tourné la meule, et, pour dire vrai, son père a manié la carde et fait de la laine. » Et, quoiqu’il se puisse bien faire qu’un homme s’occupe de deux métiers, un des députés répondit à ce reproche du roi : « Tu prétends donc que cet homme a eu deux pères, l’un cardeur et l’autre meunier. Cesse, ô roi, de parler si mal, car on n’a point ouï dire qu’un seul homme, si ce n’est en matière spirituelle, puisse avoir deux pères. » Comme ces paroles excitaient le rire d’un grand nombre, un autre député dit : « Nous te disons adieu, ô roi ! puisque tu ne veux pas rendre les cités de ton neveu, nous savons que la hache est entière qui a tranché la tête à tes frères ; elle te