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me tuez pas comme vous avez tué dernièrement mes frères ; que je puisse au moins pendant trois ans élever mes neveux que j’ai faits mes fils adoptifs, de peur qu’il n’arrive, ce que veuille détourner le Dieu éternel ! qu’après ma mort vous ne périssiez avec ces petits enfants, puisqu’il ne resterait de notre famille aucun homme fort pour vous défendre. » À ces mots tout le peuple adressa pour le roi des prières au Seigneur.

Pendant que ces choses se passaient, Rigonthe, fille du roi Chilpéric, s’avança jusqu’à Toulouse, avec les trésors dont nous avons parlé ; voyant qu’elle touchait à la frontière des Goths, elle commença à retarder sa marche, d’autant plus que les siens lui disaient qu’il fallait qu’elle s’arrêtât dans cet endroit, parce qu’ils étaient fatigués du voyage, que leurs habits étaient sales, leurs chaussures usées, et que les harnais de leurs chevaux, des voitures et des chariots dans lesquels ils étaient montés, étaient en mauvais état. Ils prétendaient qu’il fallait d’abord remettre en bon ordre toutes ces choses, pour continuer leur voyage et paraître avec élégance devant son futur époux, de peur que s’ils arrivaient mal équipés chez les Goths, on ne se moquât d’eux. Tandis qu’ils s’arrêtaient pour ces raisons, la mort du roi Chilpéric parvint aux oreilles du duc Didier. Ayant assemblé alors les guerriers les plus hardis, il entra dans Toulouse, et ayant découvert les trésors de la reine Rigonthe, il les lui enleva, les déposa dans une maison scellés de son sceau, sous la garde de soldats courageux, et laissa à la reine à peine de quoi vivre, jusqu’au moment de son retour dans la ville.