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Tandis que ceux-ci continuaient leur route avec leur butin, Chilpéric, le Néron, l’Hérode de notre temps, se rendit à sa maison de Chelles, éloignée de la ville de Paris d’environ soixante stades. Là, il se livrait à l’exercice de la chasse ; mais un jour qu’il revenait de chasser, et qu’il faisait déjà nuit, comme il descendait de cheval, s’appuyant d’une main sur l’épaule d’un de ses serviteurs, un homme s’approcha, le frappa d’un couteau sous l’aisselle, et, réitérant son coup, lui perça le ventre : aussitôt, rendant le sang en abondance, tant par la bouche que par ses blessures, il rendit son âme inique. On a vu, par ce qui précède, tout le mal qu’il avait fait, et qu’il brûla et dévasta souvent plusieurs contrées, sans en ressentir aucune douleur, mais plutôt une grande joie ; semblable à Néron, lorsque autrefois il chantait des tragédies au milieu de l’incendie des palais [Suétone, VI, 38]. Souvent il punit injustement des hommes pour avoir leur bien. Peu de clercs, de son temps, parvinrent à l’épiscopat. Il était adonné à sa bouche, et faisait son Dieu de son ventre, affirmant qu’il n’y avait pas d’homme plus sage que lui. Il a fait deux livres de vers [livre V], prétendant imiter Sédule [Sedulius] ; mais ces vers ne peuvent se soutenir sur leurs faibles pieds, et faute de s’y entendre, il y a mis des syllabes brèves à la place des longues, et des longues où il faudrait des brèves. Il a fait d’autres opuscules, comme des hymnes et des messes qu’on ne peut admettre en aucune manière. Il était l’ennemi des intérêts des pauvres, et blasphémait assidûment contre les prêtres du Seigneur. Les évêques des églises étaient, lorsqu’il se trouvait en particulier, le principal sujet de