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par le jugement de Dieu. » Lui, pour m’apaiser, et pensant que je ne devinerais pas qu’il le faisait par artifice, me montra un bouillon placé devant lui, et me dit : « Je t’ai fait préparer ce bouillon, dans lequel il n’y a autre chose que de la volaille et quelques pois chiches. » Et moi, connaissant qu’il cherchait à me flatter, je dis : « Notre nourriture doit être de faire la volonté de Dieu, et non de nous plaire dans les délices, afin que nous ne transgressions en aucune manière ce qu’il a ordonné. Toi qui inculpes la justice des autres, promets d’abord que tu ne laisseras pas de côté la loi et les canons, et alors nous croirons que c’est la justice que tu poursuis. »

Il étendit sa main droite et jura par le Dieu tout-puissant de ne transgresser en rien ce qu’enseignaient la loi et les canons. Ensuite, après avoir pris du pain et bu du vin, je m’en allai. Cette nuit même, après que nous eûmes chanté les hymnes de la nuit, j’entendis frapper à grands coups à la porte de notre demeure ; j’envoyai un serviteur, et j’appris que c’étaient des messagers de la reine Frédégonde. Ayant été introduits, ils me saluèrent de la part de la reine ; puis ils me prièrent de ne pas persister à lui être contraire dans cette affaire, me promettant deux cents livres d’argent si, me déclarant contre Prétextat, je le faisais condamner, car ils disaient : « Nous avons déjà la promesse de tous les évêques ; seulement ne va pas à l’encontre. » À quoi je répondis : « Quand vous me donneriez mille livres d’or et d’argent, je ne puis faire autre chose que ce que Dieu ordonne ; je vous promets seulement de m’unir aux autres dans