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ordonnerait ensuite. Godin qui à la mort de Sigebert avait passé à Chilpéric, et que celui-ci avait enrichi de beaucoup de bienfaits, était celui qui avait soulevé cette guerre ; mais vaincu sur le champ de bataille, il fut le premier à s’enfuir. Le roi lui ôta les domaines qu’il lui avait donnés de son fisc, dans le territoire de Soissons, et les transféra à la basilique de saint Médard.

Godin mourut peu de temps après, de mort subite. Sa femme épousa Rauchingue, homme rempli de toute sorte de vanité, gonflé d’orgueil et d’une insolente fierté ; il se conduisait envers ceux qui lui étaient soumis de telle sorte qu’on n’apercevait pas en lui la moindre humanité ; mais cruel envers les siens, au-delà de ce qui est ordinaire à la méchanceté et à la folie humaines, il commettait à leur égard des actions détestables. Lorsqu’un serviteur tenait devant lui, comme il est d’usage, pendant son repas, un flambeau de cire allumé, il lui faisait découvrir les jambes, et le forçait d’appuyer le flambeau jusqu’à ce qu’il s’éteignît ; puis le faisant rallumer il recommençait aussi longtemps qu’il le fallait pour que le serviteur se brûlât entièrement les jambes. Si celui-ci criant ou s’efforçait de s’enfuir, on le menaçait d’une épée nue, et s’il arrivait qu’il se mît à pleurer, cela augmentait les transports de joie de son maître. On raconte que, dans ce temps, deux de ses serviteurs, un homme et une jeune fille prirent, comme il arrive souvent, de l’amour l’un pour l’autre, et après que cette affection eut duré l’espace de plus de deux ans, ils se réfugièrent

    à la garde de quelque autre personne, ordinairement d’un magistrat ; c’est ce qui s’appelait custodes dare, libera custodia.