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réfugièrent dans la basilique de saint Martin, construite en planches, sur les murs de la ville. Le roi étant arrivé s’efforça, par beaucoup d’artifices, de les engager à en sortir, et comme ils ne le croyaient pas, pensant bien que ce qu’il en faisait était pour les tromper, il leur fit serment, en disant : « Puisque c’est la volonté de Dieu, je ne les forcerai point à se séparer. » Ceux-ci ayant reçu son serment sortirent de la chapelle, il les embrassa, les reçut honorablement, leur fit des festins. Peu de jours après, il retourna à Soissons, emmenant avec lui le roi Mérovée.

Tandis qu’ils étaient encore à Rouen, il s’assembla quelques gens de la Champagne qui attaquèrent la ville de Soissons, et qui, en ayant chassé la reine Frédégonde et Clovis, fils de Chilpéric, voulaient se rendre maîtres de la ville. Le roi Chilpéric l’ayant appris, y marcha avec une armée ; et leur envoya des messagers pour les avertir de ne pas l’offenser, de peur qu’il n’en résultât la perte des deux armées ; mais eux, dédaignant ce conseil, se préparèrent au combat. La bataille se livra, et le parti de Chilpéric fut vainqueur ; il mit en fuite ses ennemis, coucha sur le champ de bataille beaucoup de leurs forts et vaillants hommes, et ayant mis le reste en fuite, il entra dans Soissons. Après cela, le roi commença d’entrer en soupçon contre son fils Mérovée, à cause de son mariage avec Brunehault, disant que sa méchanceté avait été la cause de ce combat. Il lui ôta donc ses armes, et lui donna des gardes[1] viii auxquels il enjoignit de veiller sur lui, songeant en lui-même à ce qu’il en

  1. Au lieu de mettre en prison les hommes considérables, on se contentait quelquefois de leur donner des gardes chez eux ou de les remettre