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or ni argent, comme vous en avez maintenant dans vos trésors. Que faites-vous ? que demandez-vous ? quelles choses n’avez-vous pas en abondance ? Dans vos maisons les délices surpassent vos désirs ; vos celliers regorgent de vin, de blé, d’huile ; l’or et l’argent s’accumulent dans vos trésors. Mais une seule chose vous manque, la grâce de Dieu, parce que vous ne conservez pas entre vous la paix. Pourquoi l’un prend-il le bien de l’autre ? Pourquoi chacun convoite-t-il ce qui n’est pas à lui ? Prenez garde, je vous en prie, à ce que dit l’apôtre : « Si vous vous mordez et vous dévorez les uns les autres, prenez garde que vous ne vous consumiez les uns les autres[1] ii. » Examinez avec soin les écrits des anciens, et voyez ce qu’ont engendré les guerres civiles ; recherchez ce qu’a écrit Orose sur les Carthaginois iii, lorsque racontant qu’après sept cents années leur ville et leur empire furent détruits, il ajoute : « Qui les a conservés si longtemps ? la concorde ; qui les a détruits après un si long temps ? la discorde. » Gardez-vous de la discorde, gardez-vous des guerres civiles qui vous tourmentent vous et vos peuples. Que pouvez-vous espérer, si ce n’est qu’après la destruction de vos armées, demeurés sans appui, vous ne tombiez bientôt accablés par les nations ennemies ? Si la guerre civile te plaît, ô roi ! exerce-toi à ces combats que l’apôtre iv avertit l’homme de livrer en lui-même ; que l’esprit ambitionne de surmonter la chair, et que les vices soient vaincus par les vertus : libre alors, sers ton maître qui est le Christ ; au lieu qu’enchaîné tu servais celui qui est la source de tout mal.

  1. Épît. de S. Paul aux Galates, chap. 5, v. 15.