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À table, il se servait le premier, buvait sec et faisait part à ses voisins du menu des meilleurs repas qu’il avait faits la semaine précédente.

Il plaisantait familièrement avec tout le monde et, malgré leurs grimaces et leur air renfrogné « blaguait », suivant son expression, les Turcs et même les Russes dans leur propre langue, dont il estropiait d’ailleurs la plupart des mots avec une désinvolture charmante.

Malgré tout cela, on ne pouvait s’empêcher de l’aimer.

Sous l’écorce déplaisante du farceur de table d’hôte, on lui reconnaissait vite de réelles qualités de franchise, de courage et de générosité.

Il n’avait d’ailleurs pas son pareil dans sa partie et son flair était tout spécial pour dénicher, dans des villages perdus, des cuivres ouvragés, des aciers du Korassan, des tapis de mosquées ou des faïences peintes de la bonne époque.

Au physique, M. Dubois était chauve, bedonnant, toujours vêtu d’un complet de coutil blanc et d’un panama à larges bords. Sa trogne enluminée, au nez en trompette, au regard gouailleur, s’agrémentait d’une superbe paire de moustaches.

Dès le second jour de la traversée, M. Philibert Dubois, qui était un répertoire vivant d’anecdotes et de calembours, était devenu indispensable à tout le monde.

Il avait eu deux ou trois querelles violentes avec M. Bouldu, qu’il avait fort intrigué en lui