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— Je crois, dit paternellement le docteur Rabican, qu’Yvon peut s’abandonner, pour cette fois encore, à sa gourmandise. Il ne faut pas croire que nous trouverons aussi bonne chère dans tout l’Orient. Une fois engagés dans le désert, il nous arrivera sans doute d’être obligés de nous contenter de mouton grillé, ou même de racines cuites à l’eau.

Yvon rougit de se voir pris en faute, et abandonna la tranche rose de pastèque, qu’il avait entamée.

Après le café, qu’on servit avec le marc, dans de petites tasses entourées de filigranes d’argent, on apporta les sorbets, parfumés de diverses façons, et que l’on ne fabrique nulle part aussi bien qu’à Constantinople.

La nuit était presque entièrement tombée.

On avait allumé des cigarettes de latakieh.

Chacun s’abandonnait en silence à la magie de ce soir d’Orient, de ce ciel d’un azur profond de velours ou de pierre précieuse, de cette tiédeur de la brise parfumée, à la douceur de laquelle personne ne résiste.

Chacun rêvait, le docteur aux difficultés du voyage, dont il se reprochait en secret d’avoir fait partager les dangers à sa femme et à sa fille ; Yvon à la joie de commencer sa première exploration, le professeur Van der Schoppen au triomphe que son livre, documenté sur place, lui ferait obtenir près de ses confrères d’Europe.