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en mocassins

Cette manière de haranguer fait voir que l’Algonquin est très émotif. Sa placidité ressemble à la neige sur le volcan ; elle n’est, sur sa figure, que le reflet de la solitude ou le masque voulu d’une grande sensibilité qu’il cache aux étrangers et à ses ennemis, mais révèle à l’occasion par des excès contraires. Lorsqu’il tient le juste milieu, c’est que rien ne le sollicite à le quitter. La vengeance cruelle, l’héroïsme, la tendresse, le ravissement en face du beau, sont les éléments d’une sauvage synthèse dont les exemples ne sont pas rares chez cet enfant de la nature. En voici un bien éloquent :

Un jeune officier anglais se défend contre deux Abénaquis. En même temps, un vieux chef s’apprête à le percer d’une flèche ; mais, tout-à-coup, laissant tomber son arme, il se jette entre le Visage-Pâle et ses agresseurs et le sauve en l’adoptant.

Pendant quelques temps, il le comble de ses marques d’affection, lui enseigne avec sollicitude les arts sauvages ; il pense enfin se l’être attaché pour toujours.

Au cours d’une expédition, se trouvant avec lui en présence d’un camp d’Anglais, il veut savoir s’il a oublié les siens et l’interroge…

Tout en l’assurant de sa profonde reconnaissance, le jeune homme désire le quitter…

Le vieillard cache un instant son visage de ses