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religieux respect pour leurs morts en général. Tous les dix ans, ils les déterraient, nettoyaient leur os, les enveloppaient de fourrures précieuses, les chargeaient sur leurs épaules et les portaient à une fosse commune, la même pour tous les villages environnants. Là se célébrait une fête étrange : pendant plusieurs jours, on chantait, on dansait ; les femmes séparées en deux chœurs pleuraient et se lamentaient, comme autrefois les pleureuses juives ; les orateurs prononçaient d’émouvants discours.

Au milieu des squelettes qu’on suspendait aux murs de la cabane du conseil, un chef entonnait ce chant où se révèle tout entière l’âme Huronne-Iroquoise que berce une poésie sombre, et qui se fait de l’héroïsme et de la vengeance une religion.

« Os de mes ancêtres, qui êtes suspendus au-dessus des vivants, apprenez-nous à mourir et à vivre ! Vous avez été braves ; vous n’avez pas craint de piquer vos veines. Le Maître de la vie vous a ouvert ses bras et vous a donné une heureuse chasse dans l’autre monde. La vie est cette couleur brillante du serpent, qui paraît et s’efface plus vite que la flèche ne vole ; elle est cet arc-en-ciel que l’on voit à midi sur les flots du torrent ; elle est l’ombre d’un nuage qui passe. »

« Os de mes ancêtres, apprenez au guerrier à ou-