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cogomis

ge hospitalier de l’Abbitibbi. Depuis quelques jours, les feuilles mortes qui volent autour de la vieille aveugle, lui rappellent sans cesse qu’il faudra bientôt partir, et cela l’énerve un peu. Ce soir, elle a suivi de l’oreille la cérémonie bien connue, et il n’est pas un cri, pas un coup de tambourin qui ne lui ait serré le cœur.

***

Demain les tentes se rouleront pour le grand départ.

Sur le lac et les forêts, la nuit tombe. C’est l’heure d’un rendez-vous pour les trois fils de l’infirme. Avec l’ombre ils arrivent sur une colline isolée et s’y assoient pour fumer, bien secrètement, le calumet du conseil. Le vent souffle avec violence, faisant ployer les futaies, craquer les arbres, s’envoler, parmi les branches, les feuilles flétries, innombrables et bruissantes.

Awessenipin : « Si vous voulez dire comme moi, la vieille a fait son dernier voyage du côté de la rivière Moose, car autant vaut laisser ici ses os que les porter au rapide de la La-Loutre ou plus loin. »

— « Eh ! ce n’est pas moi qui veux la traîner jusqu’à la mer. » réplique Sésibahoura.

— « Nous ne pouvons toujours pas laisser notre mère ici, observe le plus jeune, car on saurait que nous l’abandonnons. »