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la fiancée du manitou

d’éclisses de cèdre. Sans doute qu’au bois, il fait déjà noir, et ils se hâtent, les deux époux, vers la pinière hantée…

Lorsqu’ils y arrivent, on n’y distingue déjà plus que les ilhouettes enchevêtrées des arbres…

Mais n’est-ce pas Lilino qu’ils aperçoivent à la lisière mal définie du bois ? N’est-ce pas la teinte pâle de ses habits qui tache l’ombre ? Et ils s’empressent d’atteindre un arbuste dont les premiers baisers de l’automne ont jauni le feuillage.

Bientôt, c’est une autre illusion qui leur fait battre le cœur, c’est une pierre qu’ils prennent pour leur fille assise au pied d’un arbre.

Ils courent maintenant dans le bleu-noir du sous-bois, la femme en avant, vers le vieux pin, le pin musical de Lilino et de Plume-Verte. Ils y arrivent, en font le tour… Rien ! Les ombres voisines sont parcourues et fouillées… Rien, rien !

Ils continuent de courir vers un rocher qui, face au couchant, borde en un endroit le vallon du ruisseau.

Devant la haute paroi roussie de reflets crépusculaires et comme vert-de-grisée par des taches de mousse, ils s’arrêtent le temps d’allumer leurs faisceaux. À dix pas, sous les branches pendantes de cèdres aromatiques, cramponnés aux crevasses de la pierre, la grotte des Esprits s’ouvre, presque menaçante, sur la nuit qui n’en sort jamais.