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en mocassins



Si je vous lance mon obole
Alors que, jouant sur les eaux,
Vous agitez l’avoine folle
Et les aigrettes des roseaux,

L’onde se trouble et vous révèle
Par ses courants capricieux ;
Mais vous fuyez à tire-d’aile
L’endroit où vous cherchent mes yeux.


Elle se tait et les yeux qui la regardent à travers les ifs, s’agrandissent de surprise et d’inquiétude : jamais sa mère ne l’a entendue parler ainsi.

De nouveaux elle écoute… Au dessus d’elle des mésanges voltigent de branche en branche, en égrenant leurs notes à voix de cigale ; la grive qu’on nomme flûte-des-bois, chante comme au fond d’un rêve ; des pics martèlent au loin les arbres creux, et les échos répètent.

Mais de même que les étoiles scintillent sans éclairer le ciel de nuit, cette symphonie sauvage ne fait que consteller la profondeur du silence.

Un vent soudain, venant du lac, s’engouffre dans le vallon, ici amorti par l’écran des massifs, là charroyant des feuilles mortes et des papillons. En même temps, il se met à chanter vaguement dans le feuillage des pins. La jeune fille regarde alors vers les branches harmonieuses. À travers les sombres