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en mocassins

Dans le voisinage de ces beautés naturelles, on trouve, en remontant plusieurs générations, une famille algonquine. Lilino, jeune fille, en est l’unique enfant, et c’est une enfant gâtée, aveuglément aimée de ses parents qui la laissent grandir dans tous ses caprices. Naturellement timide et pensive, elle ne met plus de bornes à sa mélancolie, depuis que, isolée pendant quelques jours au fond d’un bois pour y prier son esprit gardien, elle s’est passionnée pour la solitude.

Chez les tribus algonquines, le petit garçon ou la petite fille, doit, vers l’âge de huit ans, mériter de connaître son manitou protecteur, et ce spirituel gardien ne se révèle à l’enfant qu’après y avoir été longtemps sollicité par le jeûne et la prière.

Cette rude préparation a duré sept jours pour Lilino, et elle les a passés, ces longs jours, dans une petite cabane d’écorce construite exprès pour elle, au fond d’une pinière très sombre. Là, sa mère ne lui portait que de l’eau et la nourriture suffisante ; pour l’empêcher de mourir, sans la soustraire à la fièvre et à l’hallucination. Aussi, a-t-elle fini par voir son manitou, et ce fut le plus joli qu’on puisse rêver : une espèce d’oiseau-mouche tout vert, à gorge de rubis, et qui passait d’un pin à l’autre, en bourdonnant.

Depuis cette sauvage retraite, elle ne cherche plus qu’à s’isoler. Le demi-jour des forêts, le recueil-