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en mocassins

dans la lune, oppose son action néfaste aux bienfaits de son petits-fils. Amante des ténèbres qui favorisent ses instincts pervers, elle attend le coucher du soleil pour quitter son repaire céleste, et descend sur la terre pendant le sommeil de ses enfants. Sur les grèves solitaires battues par l’onde orageuse, dans l’ombre des bois ou des palissades, ses yeux ne brillent qu’au clair de l’astre argenté.

Que vient faire cette ombre parmi les vivants ? — Étant reine des mânes, Attahentsic vient chercher des sujets pour peupler son royaume. Aussitôt que la nuit déploie sa tente étoilée, gare au canotier imprudent ou peu averti : elle profite de ses moindres distractions et le pousse vers les écueils ; gare au chasseur trop aventureux : d’une voix lamentable elle l’appelle au bord d’un précipice ou le fait dévorer par les loups. C’est elle qui, de village en village, transporte les maladies contagieuses ; elle qui allume le feu des discordes fécondes en assassinats et en combats meurtriers. L’herbe-à-la-Puce n’est qu’une des cent plantes vénéneuses qu’elle a semées près du lac Ontario.

Dans le voisinage des tombeaux, on entend, la nuit, des voix grêles et plaintives, celles des mânes qu’elle chasse vers le pays des ancêtres.

Sur cette région peu connue règne avec elle son petit-fils, le Bon Jouskeha. Ils y habitent le même palais et s’y entendent pour faire le bonheur des âmes ;