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le paradis perdu

Le bord du paradis ressemble à ces côtes sauvages qu’on verra plus tard sur la terre, à, ces rives que se disputent les arbres aux longues racines plongeant dans les eaux. Mais ici, les eaux sont l’azur le plus transparent, et les racines ont des teintes de nacre et de corail. Elles s’allongent, se tordent, s’enchevêtrent, ébauchent mille formes fantastiques, s’épanouissent en un chevelu qu’on dirait taillé dans l’arc-en-ciel, s’effacent à mesure qu’elles descendent et se fondent enfin complètement dans le bleu uniforme de l’air sublime.

Par un effort suprême, les oiseaux s’élèvent plus haut que ce rivage, puis se laissent glisser sur leurs ailes immobiles, de nouveaux les agitent avec violence et posent délicatement leur glorieux fardeau sur un gazon paradisiaque, auprès d’une fontaine.

Démesurément dilatés, les yeux d’Agohao n’expriment pourtant pas encore toute la grandeur de son admiration… Ô pureté du ciel !… Ô sublimité des monts !… Ô lointains inimaginables !… Ô grâce des coteaux, fantaisie des formes, des couleurs, des groupements d’arbres !… Ô rochers ayant pour mantes la dentelle des lichens, panachés d’une végétation féerique et mirant dans les eaux leur ruine pompeuse !…

Un lac, en effet, reçoit l’eau de la fontaine et l’endort dans un dédale de rochers pittoresques.

Un mouvement de ses oiseaux, tire pour un ins-