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le paradis perdu

veront. Il ne s’agit que de les attraper. Je connais ceux qu’habitent les esprits : si j’en puis saisir un seulement, je fais comprendre mes ordres et suis sûr du succès. »

Agohao communique à ses frères sa conviction, et les voici, tous les six, qui rient de contentement et d’espérance. De nouveau, ils tiennent conseil, inventent une ruse de chasseur qui leur fera prendre de nombreux oiseaux, et fixent tous les détails de l’héroïque exploit. Le-Loup ira chercher la femme céleste dont ils ne peuvent comprendre qu’ils aient été si longtemps séparés.

***

Quelques jours plus tard, un amas d’algues flottantes attire dès l’aube la gent ailée. Il en sort de longs cheveux gris, des pieds et des mains inertes. Avec défiance, les vautours et les pigargues tournent quelques temps au-dessus. Des yeux brillants les regardent à travers les tiges limoneuses, mais eux ne voient que des jambes et des bras immobiles, et finissent par s’abattre sur ce qu’ils prennent pour un cadavre humain.

Muni d’un filet et de cordes à nœuds coulants, Agohao les attendait. Mais de ressusciter ce n’est pas déjà le moment : plein de défiance, les oiseaux géants se tiennent encore au large. S’ils feignent parfois de se lancer sur le mort, ils ne descendent qu’à mi-chemin et remontent dans les airs.