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un ancien nid du tonnerre

Le lac, bouleversé, bave sur ses rivages ;
L’arbre craque et se tord dans le val ténébreux ;
On voit au ciel rouler des vagues de nuages
Pleins de sourds grondements et sillonnés de feux.

Autour des sommets noirs bourdonne le tonnerre,
Et ses vibrants éclats auxquels répond l’émoi
Tourmentent les échos, font tressaillir la terre :
Le Peau-Rouge ne sait ou cacher son effroi.

La montagne chancelle et son faîte s’écroule :
L’avalanche de pierre à grand fracas descend,
Sur les rochers se brise, en mille morceaux roule.
Sous la chute le sol résonne en frémissant.

Les blocs font des amas pleins de grottes, de caches ;
Le roc s’accoude au roc par-dessus les ravins.
Les printemps leur feront des hures, des panaches,
En mêlant des buissons à de maigres sapins.

Alors, avec sa foudre et ses flammes rapides.
Semeuses d’épouvante et de folle terreur,
Le tonnerre gagna le haut des Laurentides.
L’assiette de son nid n’inspire plus d’horreur.

Il passe, fulgurant et déchire les nues,
Quand, surchargés d’orage, accourent les autans ;
Mais, dans les airs, pendants à ses serres crochues,
Oka ne verra plus s’envoler ses enfants.

* * *