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en mocassins

Ravi, tel un lézard que surprend une orfraie ;
Par le choc étourdi, brûlé par les éclairs,
Au nid vertigineux dont la pensée effraie.
Il mourait sous les becs enfoncés dans ses chairs.

* * *
Sur le mont Bleu rêvant, silencieux, sublime,

Ô vent, pourquoi gémir aux angles des granits ?
Des monstres pleures-tu quelque douce victime
Gisante sous ces blocs, ruines de leurs nids ?

Ô vent, chante plutôt sur le rocher placide
Par l’esprit du tonnerre aujourd’hui délaissé ;
Dis comment fut brisé son courroux homicide.
Son repaire détruit et lui-même chassé.

* * *
Un de ces jours d’automne où se dorent les chaumes.

Où le chardonneret pend aux épis grenus,
Le ciel devient livide et d’étranges fantômes
D’oiseaux planent dans l’ombre, autour des sommets nus.
Le jour se change en nuit, dans les bois le vent gronde,
Déchaîné par la main de Kabébonicka[1] ;
À coup de fouet cinglant sa rage vagabonde,
Comme un champ de roseaux courbe les pins d’Oka.

  1. Manitou qui d’après les Algonquins préside au vent du nord-ouest.