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PREMIERS PAS EN BRETAGNE

que d’y toucher ; la malpropreté des trous creusés dans la table, servant de gamelles m’affermit dans ma résolution. Cependant tous les convives mangeaient avec appétit pendant que de l’autre côté de la claie, je voyais les vaches nourricières ruminer paisiblement et qu’un gros porc, allant et venant en liberté autour de nous, sollicitait par ses grognements la générosité de chacun.

Quand tout le monde fut rassasié, la maîtresse du logis se leva et fit glisser dans leurs rainures deux portes que je n’avais pas remarquées.

— Maintenant, dit le mari, vous pouvez vous coucher.

— Me coucher… ah ! je ne demande pas mieux ; je suis exténué ! conduisez-moi, je vous prie, à mon lit !

C’est là qu’on dort, dit la femme, me désignant l’armoire béante.

— Comment là ? dans cette armoire ?

— Sans doute, avec nous !

Je regardai avec effroi trois compartiments superposés représentant trois lits ; des bottes de paille formaient une couche épaisse, des peaux de chèvre servaient de couvertures.

C’est dans la seconde case qu’on me nichait.

Un souffle éteignit la lampe fumeuse, je me mis en mesure de gagner mon étage. Lorsque chacun fut placé, les portes se refermèrent. Torturé par une faim épouvantable et par une quantité innombrable d’insectes connus et in-