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SERGENT !

sautai dans l’intérieur. J’étais en effet dans la maison ; mais quelle étrange maison !

Figurez-vous un grand espace sombre, enfumé, éclairé par une ouverture d’environ cinquante centimètres carrés ; au milieu, une claie formait une séparation ; l’un des côtés était destiné à la famille, l’autre servait de gite aux animaux.

Un bahut et une table entourée de bancs composaient le mobilier de cette demeure sordide. Ne voyant pas de lit, l’inquiétude me prit. Mon regard interrogea les coins obscurs sans en trouver l’apparence. Le maître de la maison apporta un pichet de cidre sur la table, versa, but et m’offrit son verre. Je me serais bien passé de cette politesse locale, obligatoire envers tout étranger ; mais je fis contre fortune bon cœur, je fermai les yeux pour oublier les maculations graisseuses du vase. Il m’annonça que le souper allait se préparer pendant que nous causerions de choses et d’autres ; car celui-là savait parler français, chose rare alors pour un paysan breton.

La famille au complet, la mère se mit en devoir de préparer le repas.

Elle jeta dans la chaudière une grande quantité de lait caillé, coupa de la galette de sarrazin dans une écuelle, et lorsque le contenu de la chaudière fut bouillant, elle le versa dessus.

Mon estomac, bien que fait à la cuisine militaire, se révolta à l’odeur aigrelette de ce mets, aussi, je me résignai à ne point souper plutôt