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SERGENT !

Nous sommes si prè de Signy-l’Abbaye, que je ne peux m’empêcher de parler du singulier traité qui y fut conclu entre un seigneur de Châtillon et saint Bernard. L’acte authentique était encore au dernier siècle dans les archives de l’abbaye.

Il stipulait que saint Bernard, en échange du vaste terrain qu’il recevait du comte de Châtillon, rendrait à ce seigneur le même nombre d’arpents dans le ciel.

Dans les Ardennes, le plus vénéré des bienheureux est saint Hubert, le grand chasseur, chose logique pour un pays boisé, au viiie siècle une abbaye fut fondée par les rois sous son patronage ; en reconnaissance, l’abbé de Saint-Hubert envoyait tous les ans, au souverain six chiens de chasse courans et six oiseaux de proie pour le vol. Le grand maître des cérémonies et l’introducteur des ambassadeurs faisaient entrer les animaux avec les deux classeurs et les conduisaient dans l’appartement même du roi ; celui-ci remettait une offrande pour les pauvres de l’abbaye.

Cette coutume subsista jusqu’à la Révolution.

Malgré la froide température des Ardennes, le séjour m’en plaisait ; je me trouvais bien au milieu de ces cœurs francs, de ces intelligences généreuses, de ces mœurs un peu rudes, dans ce pays frileux ; quoique les traces des temps anciens n’y fussent pas alors tout à fait détruites.