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SERGENT !

goût, mais par devoir, et je souhaitais ardem­ment reprendre mes études interrompues pen­dant notre séjour en Bretagne.

J’allai trouver le colonel, rempli pour moi de bienveillance et d’estime depuis l’affaire des Chouans. Je lui dis comment j’ai acquis les pre­mières notions d’instruction à l’âge de vingt ans, et mon désir de compléter mes études autant que possible. Je le priai de me prêter son appui afin que je pusse suivre les cours du collège.

Le colonel enchanté de cette résolution m’en félicita et me promit entière satisfaction. Deux jours après, j’étais assis sur les bancs au milieu des jeunes gena de la ville, suivant avec une attention soutenue les cours du professeur. C’est ainsi, que je finis mes classes.

Mon exemple fut suivi : huit jours après, un sergent vint s’asseoir à mes côtés. Je m’applau­dis vivement de ma décision, puisque d’autres reconnaissaient comme moi que l’ignorance seule est une honte et qu’on s’honore toujours en s’instruisant.

Nous nous primes l’un pour l’autre d’une ami­tié fraternelle, assistant aux mêmes leçons, tra­vaillant ensemble, nous quittant le moins possi­ble.

Quels bons jours ! et quelles interminables dis­ cussions ! Il était si intelligent mon camarade Beaudoin, si studieux et si dévoué ; c’était une de ces natures fines et délicates comme on n’en ren­contre guère. Il parlait peu aux étrangers ; mais quand nous étions côte à côte, il laissait déborder