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SERGENT !

» Ce sont les pierres de Karnac.

» Et tous les ans, pendant la messe de minuit, au momentde l’élévation, elles tournent sur elles-mêmes. C’est le seul mouvement qui leur soit, resté. »

— Fameux ! dit le fourrier, en me jetant un regard malicieux. Ils ont l’air de croire que c’est arrivé, ces braves gens-là, ajouta-t-il tout bas.

— Voilà, lui répondis-je, comment la supers­tition altère et dénature les faits ; jamais on ne pourra persuader à plusieurs, ici présents, que ces pierres n’ont jamais été que du granit placé là par leurs ancêtres. Ils préfèrent le miraculeux au vrai. L’instruction seule nous montre la réalité des faits et laisse à la raison sa force et sa liberté.

À ce moment, un bonnet de police passa par la porte entrebâillée, les plus jeunes de la com­pagnie tressautèrent : les soldats romains étaient encore si près ! mais la voix dit en bon français :

— Major, voulez-vous venir ? le capitaine vous demande.

Je bouclai mon ceinturon et je me préparai à sortir. — Quoi ! vous partez ! s’écria la vieille con­teuse, peut-être, mes histoires ne vous amusent pas ?

— Au contraire, nous y trouvons beaucoup de charme ; mais l’ordre du capitaine me force à m’en aller tout de suite.

— Quel dommage ! j’avais gardé le plus beau pour la fin : la Roche-aux-Fées — n’est-ce pas, Yvonne ?