Page:Guinault - Le numéro treize (1880).pdf/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
68
LE NUMÉRO TREIZE

— Si vous promettez de m’obéir, la cheminée ne fumera plus.

— Vous ôterez le sort ?

— Oui, mais il reviendra quand vous bavarderez ou que vous passerez un jour sans balayer votre maison ou sans décrasser vos enfants.

— Bon ! fit-elle en réfléchissant, c’est dit !

— Les choses étant ainsi, dit lentement le père Lascience d’un air grave, mettez ces trois brins de paille dans votre main droite, rentrez chez vous, fermez bien la porte. Vous prendrez les fêtus l’un après l’autre, et vous direz en passant le premier de la main droite dans la main gauche.

« Si je ne lave pas mes enfants tous les jours, que la peau de mon corps devienne noire comme suie ! »

Vous passerez ensuite le second :

« Si je ne balaie pas ma maison tous les matins, que j’en sois chassée pour toujours ! »

Alors vous passerez le troisième :

« Si je dis du mal de quiconque étant mon prochain, que comme langue de bœuf ma langue soit fumée ! »

Puis vous placerez ces trois brins de paille sur la cheminée afin, les ayant toujours en vue, de vous rappeler vos promesses que vous renouvellerez toute l’année, le premier jour de la pleine lune, — sans quoi, je ne réponds de rien.

— Ah ! mon père Lascience, que je vous remercie ! vous êtes un brave homme, tout de même ! Tenez, il y a déjà moins de fumée…