Elle ramassa sa serpe, la mit dans son panier et s’en alla en murmurant :
— Je le dirai à ta mère, va ! je le dirai à ta mère |
Pendant qu’elle s’éloignait, je coupai une bonne brassée d’herbe et je courus à elle.
— Tenez, Mathurine, ne vous baissez pas tant.
Je mis l’herbe dans son panier.
— Oh ! je sais bien ! tu as du bon… ce n’est pas le cœur qui te manque ; c’est la croyance !
Elle s’éloigna.
Les jours se succédèrent, comme ils sont à la campagne, calmes, mais uniformes, n’apportant de changement que dans les individus et dans les travaux.
Un jour pourtant, les femmes se mirent à chuchotter. Mathurine vint trouver ma mère :
— Dites donc, Marie-Jeanne, savez-vous la nouvelle ?
— Laquelle, Mathurine ?
— Quelle femme ! elle ne sait jamais rien.
— J’ai tant à faire dans la maison.
— Eh bien ! ma fille, je vas vous l’apprendre, dit-elle en mettant ses poings sur ses hanches, figurez-vous qu’il est arrivé, pas plus tard qu’hier soir, sur le coup de sept heures, à l’auberge du Lapin-qui-Saute, un étranger — qui n’est pas d’ici.
— Eh bien ! Mathurine, qu’est-ce que ça nous fait ?
— Ce que ça nous fait, ma chère ? Il vient s’ins-