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sur la Baie James. Un jour, les grands canots de cette Compagnie, revenant chargés de provisions et de marchandises, furent surpris par une tempête. Pour sauver leur vie, les Indiens jetèrent à l’eau toute la cargaison. Cette année-là le magasin du lac Mistassini, jamais riche, resta complètement vide. Pendant quelques années plusieurs Indiens de ce poste se rendaient trafiquer à Oskélaneo, gare du Canadien National. Le voyage se faisait par les lacs Chibougamo et Obatakoman, suivis des lacs et rivières Orhault, Brochet, Œil de Linx, Clair, pour sortir au Bassin de la Loutre sur la Saint-Maurice, en face de la mission d’Obédjiwan, et naviguer la rivière Oskélaneo, jusqu’à terme. Aujourd’hui les Indiens de Mistassini ne vont plus à Oskélaneo, mais au lac Chibougamo, nouveau terminus d’un chemin de terre venant de Roberval et de deux voies ferrées.

OBATAKOMAN
Obatakoman pour obatagama (le lac des détroits, des rétrécis) Cris
Racines : Obata, oba : détroit, rétrécis ; gama : lac, étendue d’eau.

Ce lac de la Province de Québec touche à la grande hauteur des terres, versant de la Baie James. Des centaines d’îles le parsèment, au point qu’il est difficile de sortir de ce labyrinthe et de retrouver sa route. Un jour, j’y rencontrai plusieurs Indiens protestants du lac Mistassini. Ils étaient pauvres et tristes, n’ayant absolument rien dans leurs misérables canots. Nous les avons secourus.

OBATIKWEIAK
Obatikweiak (du détroit de la rivière) Tête-de-boule, cris.
Racines : Oba : détroit ; tikweia : rivière ; locatif.

Détroit de la rivière Manouan, affluent de la Saint-Maurice. Il y eut à cet endroit un combat célèbre entre les Têtes-de-Boule et les Iroquois. Ceux-ci furent annihilés. On coupa les pouces et les index à deux prisonniers, puis on les poussa au large dans un vieux canot d’écorce en disant : « Allez et dites aux chiens d’Iroquois que s’ils reviennent sur nos terres, ils ne retourneront jamais chez eux. » J’ai vu là de mes yeux les vieux pins rouges, aux pieds noircis par le feu, où furent brûlés les prisonniers Iroquois, et jamais les Têtes-de-boule ne campent à cet endroit.

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